Sous les étoiles
Sous les étoiles
Sous les étoiles frissonnantes
L'hirondelle bâtit son nid,
Et l'essaim des cloches sonnantes
Monte sous le ciel infini.
Sous les étoiles sympathiques
Qui pleurent lorsque nous souffrons,
Nous avons tous, croyants, sceptiques,
Senti l'infini sur nos fronts.
Sous les étoiles confidentes
L'amour pur, l'amour immortel,
Brûle au fond des âmes ardentes
Comme l'encens sur un autel.
Sous les étoiles infinies,
On voit passer la charité
Qui pose ses lèvres bénies
Sur le front du déshérité.
Sous les étoiles voyageuses
Les hommes se disent: adieu!
Et durant les nuits orageuses
Les naufragés s'en vont à Dieu!
Sous les étoiles caressantes
Qui guérissent les coeurs lassés,
On voit errer le long des sentes
Les couples aux bras enlacés.
Sous les étoiles adorées
Qui protègent les nids d'oiseaux,
Les enfants aux boucles dorées
Sont à genoux dans leurs berceaux.
Sous les étoiles éternelles
Les chers mortels entr'ouvrent les yeux,
Et nous retrouvons leurs prunelles
Dans les astres silencieux
Et sous les étoiles altières
Quand les chants de mon coeur meurtri
Sont montés comme des prières,
Les étoiles n'ont pas de souri.
Ah! ne l'oubliez pas à l'heure
Où vous lirez, triste ou joyeux,
Ces pages où mon âme pleure
Sous les étoiles de vos yeux!
Zoug. Bethléhem, 4 octobre 1889.